31 mars 2005

constipation

1. La pop music, hormis quelques rares exceptions, est une musique faite par des constipés. Tout demeure dans le contrôle -- en pop music, le son, la production sont des paramètres tout aussi importants que la mélodie, le refrain, les textes. Resté concentré sur le potard à se questionner inutilement durant des heures pour savoir si c'est ici où là qu'il faut le placer ne m'intéresse pas; tout comme ne m'intéresse pas de savoir s'il faut respecter la sacro-sainte règle du couplet-couplet-refrain-couplet-refrain-pont-refrain, avec un refrain sur quatre mesures, ainsi que toute la logique qu'impose(rait) le style.

Ceci se recoupe évidemment avec la différence qu'il y a entre le pouvoir et la puissance, soit: entre le contrôle et la maîtrise du geste.

Il sera dorénavant hors de question de rentrer dans le délire de la constipation -- et S. a raison à propos du premier bouquin; j'étais bien trop dans la volonté de vouloir faire bien, peut-être parce que trop dans le respect de la littérature; et il en ressort probablement -- puisque je ne l'ai pas relu depuis -- un arrière-goût de trop-littéraire, avec cette idée de contrôler chaque phrase pour que chacune d'elle soit la meilleure possible -- d'ailleurs chose curieuse, j'ai le souvenir que les meilleurs passages sont certains monologues écrits sans trop contrôler quoique ce soit.

L'oeuvre ne repose pas sur le contrôle mais sur la maîtrise
-- le contrôle et sa perte étant l'idée actuelle et angoissante qui m'habite depuis quelques mois -- qui me guide dans des chemins tortueux, lesquels me semble être hors-limite alors même qu'ils ne sont guère, objectivement, que des petites embardées sans trop de conséquence (je repense à ce que j'ai pu dire à H., alors même que nous nous ... "mais c'est n'importe quoi" et elle de dédramatiser la situation "mais c'est rien, c'est normal"; si à mes yeux, c'était n'importe quoi, elle n'a pas eu tort de rappeler que c'était surtout normal, surtout en fin de soirée, après quelques bouteilles de vin blanc (hi!).

2. Le contrôle et les points de rupture. La crainte -- l'angoisse -- que j'éprouve à l'idée de coucher sur le papier l'histoire de Habib vient de là; bien plus que son histoire, c'est aussi la mienne qui est ici en jeu, puisqu'il s'agit de perdre tout contrôle du geste pour essayer d'en avoir la maîtrise -- puisque si Habib se doit d'être fait, c'est bien moins pour en raconter l'histoire effective que pour pouvoir passer à autre chose.

26 mars 2005

1. Lundi, absinthe, minuit, vomi.

2. Mardi, couché tôt.

3. Mercredi, Levé tôt, Vitrolles, billet bidon retour tard, couché tard.

4. Jeudi, restaurant, miam.

5. Vendredi, réveil 8h par téléphone, voix métallique à-la-THX-2001-Odyssée "vou-a-vé-pa-pé-yé-vo-tre-fac-tur-de-té-lé-fon-veu-yé-la-pé-yé". A France Télécom, ça débauche sec.

6. Rien.

20 mars 2005

19 mars 2005

ostinato

Encore là à taper sur Word -- alors que ce n'est qu'une vulgaire machine à écrire qui ne propose guère mieux que ce qui se faisait à l'époque. Se sentir en total inadéquation avec l'outil, et le malaise est là -- bien avant la difficulté même de dire ce qu'il y a à dire. Comme s'attaquer à un morceau de granit avec une cuillère à soupe.

14 mars 2005

Jandek & nous et la fille aux bas chair

Sortir de chez soi au petit matin et écouter Jandek dans la rue – et n’entendre plus la ville qu'à travers les ânonnements de sa voix désincarnée – et se laisser déambuler porter dans les rues, au son de cette fanfare, les oreilles pleines et le corps de plus en plus vide de tout nerf – décharné à l’os, sans peau ni muscle – n’être que dans une béatitude sourde et sans fond – regarder la ville de part les yeux froids des idiots – et découvrir alors le monde dans sa dimension la plus concrète, juste des corps en mouvement comme le nôtre, du métal et des vêtements, des cheveux et des mains,

et attendre alors le bus sans regarder quiconque,

et monter dans le bus sans regarder quiconque,

et descendre de ce bus ce corps qui nous appartenait et qui devient nôtre – à Jandek & nous –,

descendre de ce bus ce corps comme une vulgaire carcasse de viande – n’être que nôtre

et diffus sans contenance, nous – Jandek & nous – allons là à la recherche d’un café, la bouche vide assoiffée de l’âcreté de la caféine, de la chaleur d’une cigarette,

entrer dans le café où résonne Jandek, où Jandek annone guttural dans notre bouche – et être finalement deux, lui & nous dans la boue, et cette ville autour qui circule à un autre rythme, les têtes pleines de soucis là où les nôtres – à Jandek & nous – sont vides de tout problème tant nous avons oublié ce qu'était l'entendement, la raison -- nous corps siamois emmitouflés dans la camisole de boue, qui chante et écoute en même temps les lamentations bêtes de cette voix qu'est devenue nôtre,

et nos yeux deviennent aussi les siens, et nos sens deviennent ses sens,

et son chant devient notre chant – mélodie sans appui à l’entrain d’un corps flasque, flasque comme le goitre lourd laiteux d’un monstre que nous trouvons beau

et nous – Jandek & nous – nous prenons la tasse au comptoir et cherchons une table à travers les miroirs, et notre corps dans les reflets et nous (Jandek & nous) parmi les visages en biais des clients attablés,

et nous asseoir là et lever les yeux sur des bottes en cuir au bout de jambes accrochées aux cuisses au bout d’une jupe noire courte accrochée à un chemisier blanc au bout d’un visage froid blond froid comme le regard inquisiteur d’une fille qui n’est pas surprise que vous la regardiez tant ce qu’elle offre à voir n’est pas laissé au hasard,

et nos sens – à Jandek & nous – la regardent et glissent sur ses jambes de cuir glissant de cette jupe, en longs bandeaux de chair – la fixent et elle nous fixe (nous, Jandek & nous) fière sans crainte de ses jambes chairs en cuir au visage froid blond court les yeux au fond du vide de nos yeux à nous – Jandek & nous –

Jandek & nous comme des bêtes idiotes devant les bas chair qui se détachent des cuisses sortant de sa jupe qu’elle relève parce que ce n’est jamais assez trop,

Jandek & nous & elle, la fille au bas et aux bottes en cuir dans un café au petit matin,

Jandek & nous & la fille qui ne pensent à rien face à face dans la démonstration,

et son regard est celui des petites idiotes qui ne pensent plus

et notre regard est celui des idiots qui ne pensent plus

n’être que des sens primaires,

froids comme la viande,

et son regard sur notre visage sans expression – à Jandek & nous – cherchant quelconque réaction,

et notre regard sur ses jambes cuisses bottes bas désincarnés,
ne pas avoir de scrupule parce que nous – Jandek & nous – ne pensons plus.


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1. Bout d'essai raté. Retenter l'expérience demain, dans la mesure du possible.
2. Habib le roi des idiots.
3. Ne plus contrôler quoique ce soit -- garder le souvenir de la fin du concert complètement déconnecté de tout ce qu'il y avait autour, revoir mes doigts aller sur les cordes sans savoir ce que cela aller rendre.
4. Apprendre à respirer.

8 mars 2005

(Raymond Aron a dit, à propos de Mai 68: "nous sommes en présence d'un phénomène biologique autant que social". Au regard des 6000 manifestants présents à Guéret ce week-end -- soit la moitié de la population -- malgré le vent et les -10 degrés, au regard de l'hiver extrêmement long et de la libido frustrée de chacun, au regard des factures EDF et de fioul qui vont exploser le budget des foyers, au regard des derniers rebondissements politico-économiques, au regard du référendum en mai, au regard du chômage qui tend vers la montée, au regard de ..., cela ne serait pas une surprise si à l'arrivée du printemps qui se fait attendre et dont l'attente en exaspère beaucoup, nous n'assistions pas à un curieux phénomène tout autant biologique que social.)

Parenthèse. Au lit. Dormir.
1. Spinoza.

2. Bach.

3. Sortir de la mine.

4. ToDoList:
- lettre à la secrète (10 p.)
- Habib (90 p.)
- 2000
- l'article sur Michon/Desbordes/Faulkner
- arrêter de faire des listes