10 juin 2008

Alors elle vint et alors elle tomba sur moi

Alors elle vint et alors elle tomba sur moi
la face rouge, la face verte -- les cheveux collés par la pluie sur ses joues vertes, comme des trainées filandreuses -- des rivières d'or filant à travers la verdure de sa peau et remontant jusqu'au creux des tempes (l'ivresse m'avait conduit à y poser un doigt -- "ça va pas là, ça va pas là" je répétais en tapotant (et tu riais -- et tu étais saoule -- et nous étions saouls -- et j'étais déjà saoul du son de ta voix, de ton Verbe -- de cette langue que nous formions, l'un & l'autre confinés dans nos mots, dans cette soupe -- salement saouls, nous avons parcouru la ville -- nous les gueules rouges, hululant tournant sur nous, tournant & faisant tourner la terre à la force de nos mollets -- comme un globe roule sous deux doigts en ciseau -- nous les gueules rouges, nous les gueules vertes -- "des roseaux, des roseaux" dis-tu alors en tombant sur le pas de la porte, "des roseaux", oui, tu te pliais comme du roseau et j'ai grimpé sur tes épaules et puis ensuite tu as grimpé sur mes épaules et j'ai continué tu as continué et nous sommes arrivés si haut qu'il nous faisait mal de redescendre, qu'il nous faisait mal de redescendre -- et c'était ça, nous comprenions, nous comprenions, nous les faces rouges, nous les faces vertes, ...