29 nov. 2004

Découverte de Claude Simon -- quelques pages lues dans le bus, L'herbe, comme une espèce d'étonnement sur la technique d'écriture -- rarement eu autant l'impression de lire ce que j'aurais pu écrire (les longues parenthèses, les abus des non pas, des comme, des comme si, la guerre, le temps -- le temps qui s'éternise --, le temps suspendu -- le temps scellé --, la quasi absence radicale du point-virgule, l'ennemi juré du rythme.

Rendez-vous intérim dans la banlieue soviétique de la ville -- usine basse, toit en tôle rouillée, briques sales et béton fendu --, dans une espèce d'usine dans laquelle travaillent 200 personnes -- vision kafkaïenne de bureaux alignés de gratte-papiers --, on pouvait encore entendre le sifflotement d'un employé allant à la machine à café. Tous les murs étaient gris, ça sentait la pousière et l'odeur de la laine des gilets des secrétaires qu'elles portent sur leurs épaules, laissant pendre les manches le long de leur buste comme des vieilles chaussettes. Entretien avec un ex-nuquard, ayant probablement des vieux remords quant à avoir abandonné sa coupe de cheveux à la Rudy Woller. Maintenance d'un soft par avance mal foutu, la retape de code-maison, du boulot d'amateur que l'on ne peut pas critiquer parce qu'il est de la famille.

(Ai terminé hier soir Manhunt)

26 nov. 2004

Ai été réveillé par le tél. -- fax pub. --, journée creuse -- suis allé à Colomiers, situer l'endroit de l'entretien; village de banlieue terne (lumière d'automne rasante grise sale), de la brique, des hangars. Répét' sur kob i vento, bon boulot, content(s). Ai scribouillé des idées pour habib, à voir si ça peut tenir. -- couché 4h30. Bonsoir.

25 nov. 2004

Journée vaine; ai été réveillé par le téléphone "annonce, boulot, rdv le 2 déc."; comme un goût de fin de vacances, quand le temps se résume à un point à atteindre. Ai passé 5 heures sur Manhunt, à essayer de dégommer des bonhommes -- jusqu'au moment où j'ai compris que l'intérêt n'était pas de tuer les bonhommes, mais de passer le tableau, bon gré, mal gré. Ai croisé dans la rue Max., avec deux amis à lui; bouteille de gin à la goulée, discussion débile avec ses potes débiles; on se de demande pourquoi les gens sensibles traînent souvent avec des demeurés -- des idiots; revenir à Sh. et son "une histoire racontée par un idiot, pleine de bruit & de fureur, qui ne veut rien dire".
Soirée Clarknova rigolote (4 bières, une de trop); y ai croisé la fille-sans-nom-facile-mais-tragique. Comme une journée de vacances, vaine, creuse, avec tout le reste qui va avec, que la frustration, l'angoisse et la dérilection appellent à taire.

23 nov. 2004

avant

Hier soir, le pugilat -- débat houleux avec M. -- partouzeur fini et anarcho-bourgeois, abonné à Meetic & à l'Huma --, après qu'il ait dit "C'était mieux avant! -- avant, avant, les années 70 & 80 -- avant, avant, maintenant tous des petits cons, maintenant tous des dociles, nous on luttait, on l'ouvrait, maintenant sont là à répondre à des quizz pour gagner une bouteille -- avant, avant, avant -- avant, avant, avant -- et l'autre idiot 60naire, décharné jusqu'à l'os de vinasse, qui riait les dents cassées jaunies -- avant, on pouvait gueuler dans les bars, maintenant on vient nous dire de la fermer -- avant, avant" (et moi et mes arguments mal fichus, mais c'était la conviction du dépit contre déjà le ressentiment, contre la nostalgie du temps mort -- et moi dans ce petit monde à l'ouvrir là, enfin comme un dingue, délivré par la parole -- mal agencée, mal construite, brouillonne, comme des premiers pas -- juste être là, à lutter non pas contre ce monde-là dans lequel nous sommes, mais contre ce monde de nostalgie dans lequel tout serait bien mieux -- ni flic, ni police, ni justice, des partouzes & de la drogue, de la liberté crénom d'une pipe -- ce monde qu'ils ont saccagé en prenant tout ce qu'il y avait à prendre -- et les écouter, leurs rancoeurs et leurs désillusions -- il faudrait qu'ils sachent que nous vivons déjà par dépit -- et là où ils arrivent, nous y sommes déjà passés ("quand tu y allais, j'en revenais"). Et notre jouissance dans l'intime qu'ils étalent sans remords.

Des écrans vidéos, des jeux en réseau, des musiques complexes, des missions d'intérim, des histoires d'amour compliquées, des solitudes à mi-mots, blasés de naissance, mais l'envie d'en découdre.